Chez Samy

Peu avant mon départ du Conservatoire National Supérieur d’Art Dramatique, Hortense Archambault m’a interrogée sur mon désir de théâtre, après dix ans consacrés à la formation. Je lui ai répondu immédiatement : « travailler sur le temps long avec un groupe qui mélange les amateur.e.s et les professionnel.les, pour un spectacle qui mêle la danse et le théâtre ». Elle m’a entendue. Un an plus tard, elle m’a proposé d’écrire, sur papier et sur scène, à partir de la rencontre des habitant.e .s de Seine Saint Denis et des entretiens menés avec l’équipe de la MC 93, une œuvre qui célèbre la multiculturalité de ce département.

C’est l’histoire d’une famille. Elle est composée d’un noyau de quatre personnes : le père, la mère, la fille ainée, et le petit dernier, dont on fête l’anniversaire. A l’occasion de cette fête, les parents, tous deux français d’origine différentes, décident d’inviter leurs amis, leurs voisin.e.s, leurs parents morts (qui s’assoient à la table de fête comme les autres), toute une communauté de personnes dont aucun ne parle la même langue.

Samy, le père, tient un café. Il est bien loin de pouvoir prendre sa retraite sereinement. Ni son fils ni sa femme ne savent qu’il va devoir fermer sa petite entreprise, faute de fonds suffisants. La rumeur va pourtant se répandre. Sauver le café de Samy des mains des promoteurs va devenir l’enjeu de cette petite communauté. Le couple que forment Samy et Min vit depuis toujours en ajoutant des couverts à la table de leurs six enfants. Ils ont accueilli les uns et les autres dans un climat très inspiré de la culture inuite : fêter toutes les premières fois (la première dent, la première chute, le premier baiser…). Min était danseuse : elle ne sait pas se déplacer sans pas chassés et sauts. Tous deux sont nés de parents marqués par l’exil, qui leur ont transmis leur culture. La danse, la musique, le chant, font partie intégrante de l’écriture de cette aventure qui refuse la fatalité, et donne à la colère, à la révolte, un goût de bonheur à être ensemble.